#56
JAN/FEV/MARS 2018
L'ÉDITO
Savoir faire et faire savoir. Des années durant, ce slogan était parole d’évangile. Puis a disparu dans les décombres d’une société devenue plus sensible au « savoir ne rien faire » ou au « rien faire pour le savoir », laissant libre cours à l’immédiateté des propos et aux apparences. Pendant ce temps, des gens de métier ont heureusement continué à œuvrer comme si de rien n’était. Leur passion est leur travail, leur travail est une façon de gagner leur vie mais pas que, un art de vivre avant tout.
Dans le champ de vision que proposent les Entreprises du patrimoine vivant (EPV), on constate ainsi que le patrimoine ne se résume pas à de la pierre et des biens matériels. Le patrimoine, lorsqu’il vient du monde de l’entreprise, peut être intelligent, ingénieux, tenace, précis en toute circonstance, généreux de toute façon, engagé assurément.
La lecture géographique de ces EPV enseigne que ces savoir-faire protégés par des hommes et des femmes passionnés, varient d’un bassin à l’autre. à la Saône-et-Loire le textile haut de gamme des chaussettes et des collants, à l’Yonne les ressources insoupçonnées des sols, à la Nièvre le design et le bois, à la Côte-d’Or la pierre et les saveurs d’anis, de moutarde, de cassis et de pain d’épices.
Ces entreprises, vivantes et donc patrimoniales, portent en elles les valeurs de la pérennité et de la famille bien souvent. Elles sont de jolis outils marketing pour un territoire. Ailleurs, elles s’appellent Baccarat, Chanel, Monnaie de Paris et, c’est un comble pour qui veut soigner sa réputation, Imagerie d’Epinal par exemple. Chez nous, on connaît les plus savoureuses d’entre elles, les Mulot et Petitjean, Anis de Flavigny ou Moutarderie Fallot. Ou encore les plus emblématiques de notre histoire industrielle, comme Gerbe ou Perrin dans le bassin minier. Toutes ont leur histoire, toutes ont leur avenir scellé à l’intérêt qu’on se doit de leur accorder tout autant qu’à celui que leurs gardiens accordent aux savoir-faire dont elles sont les ambassadrices.
EPV est un label national, un de plus pourrait-on dire, qui ne fait que récompenser et ne met pas véritablement de moyens en œuvre pour accompagner le développement de ses labellisées. Mais il se suffit à lui-même. En mettant en réseau ces entreprises créatives et exemplaires, il crée le sentiment aujourd’hui nécessaire que faire bien, et le faire longtemps, est un pari sur l’avenir. Faites-le savoir.
”
Dominique Bruillot
AU SOMMAIRE
En 2018, la haute Côte-d’Or fête les anniversaires de trois hauts lieux de son patrimoine : les 900 ans de l’abbaye de Fontenay, les 400 ans de la naissance de Bussy-Rabutin et les 250 ans de la grande forge de Buffon. Derrière chacun de ces sites, se cache un personnage historique d’exception…
Face à nous, cinq portraits. Il y a entre autres Gaspard, le premier à s’être fixé en Bourgogne, là où cette famille de maçons de la Creuse est venue chercher du travail. Au mur, un imposant arbre généalogique égraine les générations de Ducherpozat à la tête de l’entreprise depuis 1590 sans interruption…
En Saône-et-Loire, plus particulièrement dans le bassin de Montceau-les-Mines, elles incarnent le renouveau du textile bourguignon : des produits entièrement fait main par les Tapis de Moroges aux collants de luxe Gerbe en passant par les chaussettes Perrin, le 71 tisse sa toile avec ambition.
Les sols de Puisaye renferment un trésor de moins en moins exploité : l’argile. Dans la région icaunaise, la terre a longtemps été une ressource de choix pour fabriquer des poteries, mais aussi des briques, des tuiles ou des carreaux. Une tradition que perpétuent les Terres cuites de Courboissy…
Saulieu est un ambassadeur de ce Morvan libéré des clichés, dont les phares sont Loiseau et Pompon. De ses 2 500 bonnes âmes, Bourgogne Magazine a extrait une galerie de personnages fiers de leur « Saûyeu » : architecte, pompiste, chauffeur-livreur, fromager, éleveur... Bienvenue dans le clan des Sédélociens.
Au tour d’Yves Jamait de passer derrière le piano de l’atelier-cuisine SEB. L’artiste dijonnais n’est pas vraiment dépaysé. Ancien cuisinier et ouvrier d’usine, il se sent doublement chez lui à Selongey. Outre son fameux franc-parler, son aisance à hacher le persil a bluffé tout le monde !
S’inspirant du l’excellente émission de Frédéric Taddeï, Bourgogne Magazine a fouillé dans les collections du Musée des Beaux-Arts de Dijon pour décrypter quelques unes de ses œuvres fabuleuses. En attendant la réouverture de l’ensemble des salles du MBA, visite « d’Art d’Art »...
Depuis 1591 au moins, les « bien bons bonbons » à l’anis de Flavigny-sur-Ozerain sont fabriqués entre les murs d’une ancienne abbaye bénédictine. Son infatigable dirigeante témoigne et prouve que la Côte-d'Or ne manque pas d’EPV aussi inventives que gourmandes…
La Nièvre est l’un des départements les plus boisés de France. On y trouve une tradition séculaire de mise en valeur des bois les plus nobles, en particulier du chêne. Petit tour dans des entreprises nivernaises qui perpétuent ce savoir-faire, entre menuiseries, parquets et moulures de qualité exceptionnelle.
Historiquement développés à partir des spécificités de leurs territoires, les métiers traditionnels du Haut-Jura font vivre de moins en moins d’artisans. Qu’ils soient horlogers, lunetiers ou diamantaires, ces derniers continuent cependant de transmettre les savoir-faire de leurs aïeux. Jusqu’à quand ?
Avec Michael Jones pour parrain, des bénévoles sur le pont et une irrésistible envie de faire la fête sans se prendre la tête, l’appellation Saint-Véran démontre, au-delà de sa Saint-Vincent, que la Bourgogne a de la générosité à revendre entre les vignes… « Ouh, je te donne ! »
À la marge des Grands Jours de Bourgogne, Guillaume Baroin a élaboré un « questionnaire du Bourguignon » façon Proust. Cinq experts internationaux y ont répondu, apportant un éclairage édifiant sur l’amour de nos bourgognes. Lequel n'a définitivement pas de frontières.